Le Débarquement diffusé vendredi dernier sur Canal+ devait relever le niveau mitigé de la première édition où l’insignifiant flirtait souvent avec la vulgarité.
Vous me pardonnerez de gâcher aussi vite l’ambiance de cette critique, mais personne ne peut prétendre détenir le monopole du bon goût, notamment en ce qui concerne l’humour, cette spécialité se déclinant en plusieurs catégories permettant ainsi à tout un chacun de s’y retrouver. Mais justement, Le Débarquement 2ème édition, c’était l’occasion de retrouver une sélection de comédiens au talent plus ou moins affirmé dont l’addition augmenterait forcément les chances d’éclats de rire ou, au minimum, de gros et jolis sourires devant notre petit écran. Parce que l’émulation, on a l’habitude d’y croire. Quelques chouchous dans le lot et on pouvait espérer que le reste de la troupe parte dans le même sens.
Mais si vous aviez été de celles et ceux ayant assisté au premier Débarquement, alors vous savez probablement à quoi vous en tenir, et que Jean Dujardin surnagera sûrement cette fois encore au milieu de tentatives avortées de divertir l’assistance. Et ça n’a pas raté, ce nouveau Débarquement s’est avéré encore plus oubliable que le précédent. Oui, je sais ce que j’ai dit plus haut, et que le ressenti de ce billet ne sera peut-être pas le vôtre ni même celui de votre voisin. Mais avant de poursuivre, quelques mots sur ce qu’est Le Débarquement. Il s’agit d’une succession de fausses publicités et de sketches tantôt enregistrés, tantôt joués en direct par une pléiade de stars françaises, un peu à la manière du Saturday Night Live. Malheureusement pour la troupe du Débarquement, Samedi Soir en Direct s’était déjà essayé en 2003 à une adaptation frenchy du concept, en ayant défini au passage un standard élevé de qualité, à la fois dans l’interprétation et l’écriture. Le jeu des comparaisons n’a donc pas tardé.
Samedi Soir en Direct, c’était, sans compter les invités, 6 comédiens. Le Débarquement 2ème cuvée, 35. Avant la première diffusion, on s’était dit « pourquoi pas ? », d’autant plus qu’il y avait du beau monde à répondre présent (Jean Dujardin, oui, mais aussi Laurent Lafitte, Bruno Salomone, Nicolas Bedos, Guillaume Canet), mais on a pu constater que ça n’avait pas fonctionné. À cause d’un nombre trop conséquent de guests nuisant ainsi à un bon équilibre de l’ensemble (avec des temps de présence visiblement disproportionnés), de textes pas assez percutants à la base et trop axés sur des vannes bas du front ? Peut-être un peu des deux mon capitaine. Le problème avec ce premier Débarquement, c’est qu’il m’a personnellement rendu très méfiant avec le second, comme si j’en voulais tellement au Débarquement 1 que j’avais décidé de ne délivrer un rire à son petit-frère que s’il se rongeait les sangs.
Sans surprise, ce premier rire a coïncidé avec une réplique bien placée de Pierre-François Martin-Laval (PEF), accompagné de Marina Foïs pour une parodie de Money Drop au concept intéressant mais effleuré et dont l’intérêt ne semblait reposer que sur l’interprétation du duo. Ne me parlez pas de l’intro du show, convenue, fade et sans conviction, de Dujardin et Lellouche qui ne valait absolument pas celle du premier Débarquement où Laurent Lafitte partageait contre son gré, mais avec une gêne hilarante, la présentation de la soirée avec Evelyne Leclerc. Mais malgré cela, et ce sera la dernière fois que je l’évoquerai dans ce papier, Jean Dujardin s’est montré globalement convainquant dans ses interventions, même si l’on aura pu regretter dans le sketch du négociateur qu’il n’ait pas été mis en face de comédiens « confirmés », simplement pour donner du coffre à la blague et éviter cette impression de se retrouver face à un professeur et ses élèves. Au bout d’un moment, j’en étais même venu à souhaiter qu’il ne réapparaisse plus dans aucun sketch, sachant qu’il assurerait de toute façon mieux que les autres et ayant également l’impression que faire appel à lui devenait comme une solution de facilité. Tout comme les rapports vulgaires et explicites au sexe, malheureuse constante.
Tout n’était pas à jeter (le faux reportage sur Leïla Bekhti, le sketch avec Dark Vador et son avocat, sympathique à défaut de remettre le bateau à l’horizontale) mais nous n’en étions pas loin (les Maternulles, le Téléachat, des séquences inutilement longues et insipides). Rien ne semblait vraiment maîtrisé, en témoigne l’absence de comédiens pourtant annoncés par Canal (Géraldine Nakache, JoeyStarr, Albert Dupontel…). On peut légitimement se demander si les auteurs de ces deux numéros du Débarquement sont réellement capables de s’adapter à ce format, et j’irai même jusqu’à y répondre sans attendre, puisque le mot « navrante » me semble bien choisi pour qualifier l’heure et demie que j’ai passée devant une chaîne dont l’humour se conjugue désormais visiblement au passé.
Empiler des noms, c’est une idée, mais si c’est pour faire tomber l’édifice sitôt celui-ci monté, l’entreprise est juste inutile. Mais vu que ce Débarquement-là a fait de meilleures audiences que le précédent, n’attendons pas d’une possible troisième édition qu’elle remonte dans l’estime des déçus des deux premières, à moins qu’elle ne s’abstienne par exemple de brandir des symboles phalliques à tout bout de champ, de faire appel à des seconds couteaux qui prennent décidément trop de place, tout en faisant l’effort de repenser encore et encore des textes pour le simple respect du téléspectateur qui ne demande qu’à en rire.